Page:Courteline - Les Linottes, 1899.djvu/92

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aux yeux de jars écarquillés dans une pleine lune de saindoux.

— Monsieur Hamiet ?

— C’est ici.

Il entra.

Le cabinet de Frédéric Hamiet, achevé dans des verdures de serre que baignait d’une lumière blanche la soie d’un store descendu, proclamait le goût infini de l’homme qui l’avait disposé. Cozal, entrant, subit cette impression de bien-être que dégagent en fraîches pénombres, en discrètes intimités, les milieux faits pour le travail.

Il trouva son nouvel ami en conférence avec un gros petit monsieur écarlate, qui, visiblement résolu à repousser toute explication, s’enfermait comme dans une tour dans ce simple mot :

— Mon argent !

En vain, avec le plus grand calme :

— Taisez-vous donc ; vous êtes ridicule, mon cher, affirmait Frédéric Hamiet.

— Mon argent ! Je veux mon argent ! répétait cet homme obstiné.

Nous pensons que ce plaisant poussah était entré en coup de vent : n’ayant quitté ni son pépin, qu’il agitait de haut en bas dans une allée et venue ininterrompue de marteau-pilon au labeur, ni son paletot à boutons de corozo plus larges que des coquilles d’huîtres, ni son chapeau un peu trop vaste, que lui ramenait sur les sourcils de vingt secondes en vingt secondes, avec une opiniâtreté douce et exaspérante, une coiffe oléagineuse. Et il s’indignait, il disait :

— Voilà la troisième fois que vous me fourrez dedans avec vos idées mirifiques et vos contes à dormir debout ; vous