Page:Courteline - Messieurs les ronds-de-cuir, 1893.djvu/49

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à galoper de son cabinet aux archives, où il s’éternisait inexplicablement et d’où il revenait blanc de poussière, pressant sur son plastron, de ses mains de charbonnier, des dossiers que visiblement il avait dû aller chercher à plat ventre sous les arêtes aiguës des toits, embroussaillées de toiles d’araignée. Il avait apporté une échelle double, du haut de laquelle, souriant et âpre, il fouillait les recoins de sa pièce, sondant de coups de poing le plafond et les murs, avec l’espérance que, peut-être, d’autres documents en jailliraient encore !… Sur sa tête à demi vénérable déjà, d’antiques cartons, arrachés violemment à l’étreinte de leurs alvéoles, s’ouvraient, lâchant des avalanches de paperasses qui se répandaient par le vide, pareilles à des vols d’albatros, pour se venir écrouler en monceaux sur le sol ; mais il ne s’en effarait pas, ravi plutôt, chez soi au cœur de ce pillage, et gardant du haut de son perchoir une face silencieusement rayonnante. Et quand enfin, autour de lui, c’était le triomphe du chaos, l’orgie auguste du pêle-mêle, l’enchevêtrement définitif et à tout jamais incurable, Van der Hogen prenait sa plume et documentait à son tour, lancé maintenant dans des flots d’encre. Entre deux murailles de dossiers