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Page:Couverchel - Traité des fruits, 1839.djvu/380

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de l’aspect le plus agréable et d’un goût très-suave, figure avec avantage dans les desserts somptueux.

Confiture ou gelée de groseilles.

Le moyen de conservation le plus généralement adopté et le plus approprié aux habitudes gastronomiques est, sans contredit, la confiture ou gelée, elle s’obtient, soit à chaud, soit à froid ; sous cette forme la groseille n’est pas seulement rafraîchissante, elle nourrit et joue un rôle très-important dans le régime des vieillards et des enfants ; tout ce qui concourt dans la famille au bien-être individuel ressortissant des attributions d’une bonne ménagère, nous recommanderons, dans le cours de l’ouvrage, les opérations d’économie domestique qui, comme celle-ci, doivent entrer dans l’éducation secondaire des jeunes filles.

Pour obtenir la gelée de groseilles bien transparente et surtout tremblante, il faut, comme nous l’avons dit au chapitre Maturation, prendre des groseilles qui ne soient pas trop mûres, car sans cette précaution la gelée serait louche, et on serait obligé de la clarifier, ce qui ne peut s’effectuer sans altérer la consistance et surtout sans dissiper en partie l’arôme qui distingue ce fruit et qu’il importe tant de conserver. On ajoute plus ou moins de groseilles blanches suivant qu’on les veut plus ou moins colorées et plus ou moins acides ; on est aussi dans l’usage d’y joindre des framboises, mais en petite proportion ; leur arome s’associe d’une manière très-heureuse avec celui de la groseille. Suivant aussi qu’on veut les obtenir plus ou moins belles, on ajoute plus ou moins de sucre. Si, par exemple, au lieu de mettre une livre de sucre par livre de fruit, comme on le fait généralement, on met vingt ou vingt-quatre onces du premier, on obtient une très-belle et très-bonne gelée, attendu que la chaleur n’est pas assez prolongée pour altérer la gélatine et dissiper l’arome ; la cuisson s’effectue, en effet, dans ce cas, presque instantanément ; si l’on craint que la grande proportion de sucre ne les porte à candir, l’addition d’un peu de miel de Narbonne garantira de cet inconvénient.

Le procédé le plus ordinaire consiste à prendre douze livres de groseilles rouges, trois livres de groseilles blanches, une livre environ de framboises et quinze ou vingt-deux livres et demie de sucre, suivant qu’on veut faire des confitures de ménage ou d’office. On égrène les groseilles on épluche les framboises, on fait macérer ces dernières dans une partie du sucre, puis on mêle ensemble les groseilles et le reste du sucre, concassé en poudre grossière, dans une bassine non étamée (sans cette précaution la gelée se colorerait en violet) ; on fait bouillir à grand feu, si on n’a mis que livre pour livre ; mais, si la proportion de sucre est plus considérable, on laisse sur le feu le temps seulement nécessaire pour faire crever les groseilles ; pour s’assurer du degré de la cuisson, on en jette quelques gouttes sur une assiette, et si on voit que la confiture se fige et que, sans être tout à fuit froide, elle se déplace difficilement lorsqu’on incline l’assiette, on en conclut qu’elle est cuite ou très-près de l’être ; on y projette alors les framboises, en les faisant plonger avec l’écumoire, on laisse donner un nouveau bouillon pour évaporer une portion de l’humidité qu’elles apportent ; on retire de nouveau du feu et on verse sur un tamis de crin. On doit se garder d’exprimer, car on obligerait à passer une portion de gélatine visqueuse et louche qui adhère aux semences, et qui, indépendamment de la saveur âpre qu’elle doit à ce voisinage et qu’elle transmettrait à la confiture, altérerait sa transparence.

La gelée de groseilles, préparée à froid, s’obtient en écrasant les groseilles, exprimant le jus à travers un linge, et faisant dissoudre à celui-ci assez de sucre pour qu’il en soit complètement saturé ; à cet effet, on agite le mélange avec une écumoire, et on l’abandonne dans un lieu frais jusqu’au moment de le mettre en pots. Cette gelée faite sans feu conserve tout le parfum de la groseille.