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Page:Crébillon (Fils) - Le Sopha.djvu/126

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LE SOPHA

qu’une femme fasse une pareille réflexion ? Ce qu’il y a de certain pour moi, c’est qu’en pareil cas je me fâcherais, et je ne m’en croirais pas moins responsable, non ! Voyons pourtant ce que dit Zéphis ; car, à ce que je vois, en cela comme en toute autre chose chacun a son goût.

— Quelque indulgente qu’elle fût, reprit Amanzéi, l’obstination du malheur de son amant me parut l’ennuyer : soit qu’ayant plus fait pour lui que la première fois, elle crût le mériter moins ; soit qu’étant en ce moment plus favorablement disposée, elle trouvât dans sa raison moins de force pour le soutenir.

« Mazulhim, moins convaincu que Zéphis de son infortune, ou accoutumé peut-être à braver de pareils malheurs, ne pensant pas de Zéphis aussi bien qu’il le devait, tenta ce que, s’il eût été plus sage, ou plus poli, il n’aurait pas tenté. Il me sembla qu’elle n’agréait pas une épreuve qui lui montrait moins encore de présomption dans Mazulhim, que la mauvaise opinion qu’il osait avoir de ses charmes.

« Malgré son trouble, il lui échappa un sourire malin qui semblait dire à Mazulhim qu’elle n’était point personne avec qui cette témérité fût placée, et pût être heureuse. Sûre qu’il en serait bientôt puni, elle se livra à ses ridicules entreprises, avec une intrépidité que toute femme est assez vaine pour avoir en pareil cas, mais qui n’est point dans toutes