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LE SOPHA

plus touchants, lui firent sentir cette émotion qu’il avait jusque-là cherchée si vainement, et dans le doux désordre qui commençait à s’emparer de ses sens, ayant perdu le souvenir de ses malheurs, ou en étant alors plus irrité qu’abattu, il vainquit enfin glorieusement ces obstacles cruels, par lesquels il s’était vu si longtemps et si cruellement arrêté.

— J’entends, dit alors le Sultan, c’est fort bien fait : il vaut mieux tard que jamais ; c’est-à-dire que…

— N’allez-vous pas nous expliquer cela, interrompit la Sultane, et pensez-vous qu’Amanzéi ait eu la prudence ou la finesse de nous laisser quelque chose à deviner ?

— Je n’en sais rien, reprit le Sultan, ce ne sont pas là mes affaires ; mais enfin, c’est que, comme vous le savez aussi bien que moi, ce Mazulhim est un peu sujet à des accidents, et qu’il me paraît tout simple que l’on s’informe… parce que, par hasard, il se pourrait… Eh bien ! dites-moi donc un peu : Mazulhim ?

— Sire, il fut heureux ; mais il savait mieux offenser qu’il ne savait réparer les outrages qu’il faisait, et je doute que s’il eût eu affaire à une personne moins généreuse que Zéphis, il eût pu pour si peu obtenir un pardon. Plus vain qu’il n’était amoureux, il me parut moins sentir le bonheur de posséder Zéphis que le plaisir d’avoir moins à rougir devant elle. Ils commencèrent une conversation tendre, où