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Page:Crébillon (Fils) - Le Sopha.djvu/147

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LE SOPHA

« À ces mots, elle se leva malgré tous les efforts qu’il fit pour la retenir :

— « Laissez-moi, lui dit-elle d’un ton aigre ; je ne veux ni vous voir, ni vous entendre.

— « Assurément ! s’écria-t-il, j’en ai vu d’aussi malheureuses, mais je n’en ai jamais vu d’aussi fâchées ! »

« Cette exclamation de Mazulhim ne plut pas à Zulica ; désespérée de l’accident qui lui arrivait, outrée de l’air froid de Mazulhim, elle s’en prit dans sa fureur à un grand vase de porcelaine qu’elle trouva sous sa main, et qu’elle brisa en mille morceaux.

— « Hélas, Madame ! lui dit Mazulhim en souriant, vous n’auriez rien trouvé ici à briser, si toutes les personnes qui n’y ont pas été contentes de moi s’en étaient vengées de la même manière ; au reste, ajouta-t-il en s’asseyant sur moi, je vous conjure de ne pas vous gêner. »

« Mazulhim, en finissant de parler, se mit à rêver d’un air distrait. Zulica, qui était allée s’asseoir dans un coin, et loin de lui, soutint assez bien pendant quelque temps la méprisante indifférence qu’il lui témoignait ; et pour la lui rendre, elle se mit à chanter.

— « Ou je me trompe, lui dit-il, quand elle eut fini, ou le morceau que Madame vient de me chanter est d’un tel Opéra. »

« Elle ne répondit rien.

— « Vous avez, continua-t-il, une jolie