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LE SOPHA

« Zulica convenait bien qu’il y en avait qui, en effet, ne commençaient pas d’une façon brillante, mais dont à la fin on trouvait plus à se louer qu’à se plaindre.

« Ils se mirent à se promener dans la chambre, tous deux fort embarrassés l’un de l’autre, sans amour, sans désirs, et réduits, par leur mutuelle imprudence et l’arrangement qu’entraîne un rendez-vous dans une petite maison, à passer ensemble le reste d’un jour qu’ils ne paraissaient pas disposés à employer d’une façon qui pût leur plaire. Ils se promenèrent quelque temps sans rien dire ; de temps en temps cependant ils se souriaient d’une façon froide et contrainte.

— « Vous rêvez ! lui dit-il enfin.

— « Vous vous en étonnez ? répondit-elle d’un air prude ; pensez-vous que d’être avec quelqu’un comme je suis avec vous ne soit point, pour une femme raisonnable, une chose extraordinaire ?

— « Non, répliqua-t-il ; j’y crois les femmes raisonnables tout à fait accoutumées.

— « Il paraît bien, reprit-elle, que vous ignorez ce que cela prend sur elles, et combien, avant que de se rendre, elles éprouvent de combats.

— « Ce que vous dites, par exemple, est très probable, répliqua-t-il ; car à la façon dont elles les ont abrégés, il fallait qu’ils les fatiguassent cruellement.