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LE SOPHA

— « Vous n’étiez pas coupable ? répéta-t-elle ; qu’étiez-vous donc devenu ?

— « Je ne suis, répliqua-t-il, sorti de chez l’Empereur qu’à l’heure à laquelle vous m’avez vu arriver ici, et Zâdis même, à qui, par parenthèse, on a fait mille plaisanteries sur ce qu’il a été hier perdu tout le jour, ne m’a point quitté ; il peut vous le dire. »

« Au nom de Zâdis, Zulica frémit, et regarda en rougissant Mazulhim qui, sans paraître remarquer aucun de ses mouvements, continua ainsi :

— « Quoique toujours j’aie pour vous un goût fort vif, vous concevez bien que nous ne vivrons plus ensemble dans cette intimité que vous m’aviez permise. Ce n’est pas que je ne vous pardonne tout : mais un commerce lié ne nous convient plus ; au reste, nous nous étions pris plus de fantaisie que d’amour ; ce n’était point le sentiment qui nous unissait ; ce qui arrive ne doit ni vous mortifier ni me déplaire, ni nous empêcher de céder au caprice, si, sans vouloir nous reprendre, nous nous en trouvons quelquefois susceptibles l’un pour l’autre.

— « Je me flatte, répondit-elle dédaigneusement, qu’en faisant cet arrangement vous en sentez tout le ridicule, et que vous n’espérez pas de m’y faire consentir.

— « Pardonnez-moi, reprit-il : vous êtes trop raisonnable pour ne point sentir ce que