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LE SOPHA

d’hypocrisie. Ces deux odieuses personnes se séparèrent enfin, et Fatmé alla désespérer son mari, en faisant parade de ses mortifications.

« Pendant que je fus chez elle je ne lui connus point d’autres façons d’amuser ses loisirs, que celles que j’ai racontées à Votre toujours auguste Majesté.

« Fatmé, toute prudente qu’elle était, s’oubliait quelquefois. Un jour que, seule avec son Brahmine, elle se livrait à ses transports, son mari, que le hasard conduisit à la porte du cabinet, entendit des soupirs et de certains termes qui l’étonnèrent. Les occupations publiques de Fatmé laissaient si peu imaginer ses amusements particuliers, que je doute que son mari devinât d’abord de qui partaient les soupirs et les étranges paroles qui venaient de frapper ses oreilles.

« Soit enfin qu’il crût reconnaître la voix de Fatmé, soit que la curiosité seule lui fît désirer de s’éclaircir de cette aventure, il voulut entrer dans le cabinet.

« Malheureusement pour Fatmé, la porte n’était pas bien fermée, et il l’enfonça d’un seul coup.

« Le spectacle qui frappa ses yeux le surprit au point que, sa fureur demeurant suspendue, il sembla pendant quelques instants douter de ce qu’il voyait, et ne savait à quoi se déterminer.