Ah ! Loin qu'à votre amour votre cœur s'abandonne,
Vous voyez et mon trouble et l'état où je suis.
Seigneur, ayez pitié de mes mortels ennuis :
Fuyez ; n'irritez point le tourment qui m'accable.
Vous avez un rival, mais le plus redoutable.
Ah ! S'il vous surprenait en ce funeste lieu,
J'en mourrais de douleur. Adieu, Seigneur, adieu.
Si sur vous ma prière eut jamais quelque empire,
Loin d'en croire aux transports que l'amour vous
Inspire...
Quel est donc ce rival si terrible pour moi ?
En ai-je à craindre encor quelque autre que le roi ?
Sans vouloir pénétrer un si triste mystère,
N'en est-ce pas assez, Seigneur, que votre père ?
Fuyez, prince, fuyez ; rendez-vous à mes pleurs :
Satisfait de me voir sensible à vos malheurs,
Partez, éloignez-vous, trop généreux Arsame.
Un infidèle ami trahirait-il ma flamme ?
Dieux ! Quel trouble s'élève en mon cœur alarmé !
Quoi ! Toujours des rivaux, et n'être point aimé !
Belle Isménie, en vain vous voulez que je fuie ;
Je ne le puis, dussé-je en perdre ici la vie.
Je vois couler des pleurs qui ne sont pas pour moi !
Quel est donc ce rival ? Dissipez mon effroi.
D'où vient qu'en ce palais je vous retrouve encore ?
Me refuserait-on un secours que j'implore ?
Les perfides romains m'ont-ils manqué de foi ?
Ah ! Daignez m'éclaircir du trouble où je vous vois.
Parlez, ne craignez pas de lasser ma constance.
Quoi ! Vous ne romprez point ce barbare silence ?
Tout m'abandonne-t-il en ce funeste jour ?
Dieux ! Est-on sans pitié, pour être sans amour ?
Eh bien ! Seigneur, eh bien ! Il faut vous satisfaire :
Je me dois plus qu'à vous cet aveu nécessaire.
Ce serait mal répondre à vos soins généreux,
Que d'abuser encor votre amour malheureux.
Le sort a disposé de la main d'Isménie.
Juste ciel !
Et l'époux à qui l'hymen me lie