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Page:Crébillon - Théâtre complet, éd. Vitu, 1923.djvu/404

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Digne de s'affranchir de vos soins odieux.
Chacun a ses vertus, ainsi qu'il a ses dieux.
Dès que le sort nous garde un succès favorable,
Le sceptre absout toujours la main la plus coupable ;
Il fait du parricide un homme généreux.
Le crime n'est forfait que pour les malheureux.
Pâles divinités qui tourmentez les ombres,
Et répandez l'effroi dans les royaumes sombres,
Venez voir un mortel plus terrible que vous,
Surpasser vos fureurs par de plus nobles coups.
Du plus illustre sang ma main bientôt fumante,
Va tout remplir ici d'horreur et d'épouvante.
Tout va trembler, frémir ; et moi, je vais régner.
Vertu, c'est à ce prix qu'on peut te dédaigner.
J'aperçois Darius ; une affreuse tristesse
Semble occuper son cœur.

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Scène III

Darius, Artaban.
Darius.

Où donc est la princesse ?
Ne viendra-t-elle point ?

Artaban.

Dissipez ce souci ;
Je vais, dans le moment, vous l'envoyer ici.
Pour vous livrer, Seigneur, une amante si chère,
J'attendais de la nuit le sombre ministère ;
J'ai moi-même, avec soin, fait le choix des soldats
Qui doivent en Égypte accompagner nos pas.
Je ne crains qu'Amestris ; soit crainte ou prévoyance,
Je n'ai trouvé qu'un cœur armé de défiance ;
Elle hésite à vous voir, je lui parais suspect.
Donnez-moi ce poignard, Seigneur ; à son aspect,
Peut-être qu'Amestris qui doutait de mon zèle,
N'osera soupçonner un témoin si fidèle.
Adieu, je vais presser un si doux entretien ;
Puisse-t-il vous unir d'un éternel lien !

Darius.

Allez, le temps est cher ; mon âme impatiente
Commence à se lasser d'une si longue attente.

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