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journal du siège de paris.

de passeport, anglais ou américain, qui puisse faire franchir les lignes ennemies. Il n’y a plus que la voie aérienne qui soit libre. La poste envoie des ballons quand le vent est favorable. Où tombent ces malles-postes d’un nouveau genre ? entre les mains des Prussiens ou entre celles des Français ? Nous n’en savons encore rien.

Dimanche soir, 25 septembre. — Décidément, nous sommes condamnés au beau temps à perpétuité. Nous sommes en automne depuis quatre jours et cependant nous avons un soleil de juillet. Beaucoup de monde dans les églises. Même le soir, à l’archiconfrérie, on trouve un grand nombre d’hommes, militaires et pékins, qui viennent entendre la parole de Dieu. La situation militaire n’a pas changé depuis hier. Quelques coups de canon seulement du côté d’Aubervilliers, destinés sans doute à culbuter des batteries prussiennes. C’est pendant la nuit, du reste, que nous devons nous attendre aux attaques de l’ennemi. Il y a quelques jours, on a surpris des espions prussiens qui, du sixième étage d’une maison de Batignolles, faisaient des signaux, au moyen de lumières de couleurs différentes, au quartier allemand établi à Neuilly. Ces espions ont été envoyés à la Préfecture de police. Depuis, les malheureux Parisiens soupçonnent toutes les bougies et toutes les lampes d’avoir des relations criminelles avec Bismark. Quand on demeure au 5e ou au 6e, il ne faut plus allumer ni chandelle ni gaz, car les commères et les concierges, à qui l’affaire de Batignolles a mis