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dernières lettres.

Jacques me dit que vous avez eu un mois d’avril froid et pluvieux, et qu’il a été indisposé, par suite des variations subites de la température. J’espère que le joli mois de mai dont les charmes existent plutôt dans l’imagination de ces farceurs de poètes que sur les bords du Saint-Laurent, aura apporté à Jacques, avec les brises printanières et les parfums des fleurs fraîchement écloses, un remède à l’indisposition que le mois d’avril lui avait causée.

Dans sa lettre du 17 mars, Jacques me prouve que vous étiez mieux informés que nous sur ce qui se passait à Paris. Le télégraphe vous avait appris que les garibaldiens arrivaient en nombre à Paris. Pour nous, habitants de la capitale du monde civilisé, nous n’avons su que le lendemain du 18 mars que nous devions à la bande du héros de Caprera l’assassinat du général Thomas et du général Comte, et cette belle révolution qui a porté à l’Hôtel de Ville un gouvernement composé aux trois quarts de fripons et de souteneurs de filles publiques. Il faut que la Babylone moderne soit bien coupable pour que Dieu lui inflige cette humiliation suprême d’être gouvernée depuis deux mois par de pareilles canailles. Ce qui étonne, ce ne sont pas les cinquante mille pendards qui sont arrivés à terroriser la capitale. Dans une ville de plus de deux millions d’âmes, le centre de toutes les conspirations européennes, il n’est pas étonnant que l’on trouve 2½% de la population qui soient des gens de sac et de corde. Ce qui est inconcevable, c’est que les 97½% qui