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restent, armés et aguerris comme les 2½%, puisque tout le monde était soldat pendant le siège, se laissent ainsi faire la loi par cette infecte crapule. Il est vrai que rien n’égale la pusillanimité, la lâcheté des bourgeois et du boutiquier de Paris. Quand Paris était assiégé par les Prussiens, ils allaient aux tranchées et aux avant-postes, d’abord parce qu’ils voulaient empêcher l’étranger d’entrer à Paris, mais surtout parce qu’il y avait cent mille soldats sérieux qui leur auraient tiré dessus, s’ils n’avaient pas voulu obéir aux ordres du général Trochu.

Le 18 mars, il n’y a plus de dictature militaire. C’est un pékin, M. Thiers, qui est le chef du pouvoir exécutif. On s’en moque comme de l’an quarante. En vain le ministre de l’intérieur fait battre le rappel pendant l’après-midi du 18 mars, pour que les gardes nationaux du parti de l’ordre aillent combattre la canaille de Belleville et de la Villette, personne ne répond à cet appel. Dans la rue de l’Entrepôt et ses environs, j’ai entendu plus de dix boutiquiers dire : Que le gouvernement s’arrange, ce n’est pas moi qui risquerai ma peau pour le défendre !

Abandonné par cette masse inerte qui compose le parti des honnêtes gens, le gouvernement a bien été obligé de se réfugier à Versailles. Le bourgeois de Paris, plutôt que de se battre, acceptera tous les gouvernements, quelque honteux qu’ils soient, sanctionnera toutes les usurpations, quelque scandaleuses qu’elles paraissent aux yeux de l’univers écœuré devant le spec-