Page:Crépet - Charles Baudelaire 1906.djvu/204

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tions ont été des grâces de Dieu. — Ma phase d’égoïsmc est-elle finie ?… » Et cette sentence, répétée sous plusieurs formes, résume le sentiment suprême du poète : « Il n’y a qu’une chose importante, être un héros et un saint pour soi même. »

Ainsi, plus la force de volonté, nécessaire au succès des grandes résolutions, diminuait chez le pauvre poète, plus son aspiration aux sommets sublimes de l’a me et de la vie devenait impérieuse.

En même temps, et par une conséquence toute lo gique, son horreur de toute médiocrité s’exaspérait. Ses convictions politiques et littéraires n’ont jamais été plus tranchées, plus exclusives ; elles ne sont jamais exprimées avec une plus violente franchise que dans lefactum à Jules Janin, les Journaux intimes, ou encore cette lettre du 1 8 février 1866 :


« Et vous avez été assez enfant pour aller écouter ce petit bêta de Deschanel ! professeur pour demoiselles ! démocrate qui ne croit pas aux miracles, et ne croit qu’au bon sens ! parfait représentant de la petite littérature I petit vulgarisateur de choses vulgaires ! etc., etc. Et vous avez été assez enfant pour oublier que la France a horreur de la poésie, de la vraie poésie ; qu’elle n’aime que les saligauds comme Béranger et de Musset ; que quiconque s’applique à mettre l’orthographe passe pour un homme sans cœur (ce qui est d’ailleurs assez logique puisque la passion s’exprime toujours mal) ; enfin, qu’une poésie profonde, mais compliquée, amère, froidement diabolique en apparence, était moins faite que toute autre pour la frivolité éternelle.. . !

» Et, à propos ! Qu’est-ce que c’est donc que la poésie fantaisiste ? Je ne pourrai jamais le deviner. Je défie de l’expliquer, comme je défie un journaliste ou un professeur quelconque d’expliquer le sens d’un seul des mois dont il se sert. Il y a donc une