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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

son diocèse de Châlons (il n’était pas encore Archevêque de Rouen). Les uns parlaient de sortilèges et d’affinité suspecte avec les Bohémiens ; les uns parlaient du Diacre Pâris ou du Chevalier de Folard, et les autres discouraient sur le Vampirisme, ce qui, du reste, n’aurait jamais expliqué comment une grande femme de cinq pieds quatre pouces aurait pu s’évaporer sans qu’il en restât rien ! Tout le monde en parlait, et l’on en parla pendant long-temps, par la bonne raison qu’on ne savait qu’en dire. Le Chancelier d’Aguesseau m’a dit cent fois qu’il n’en savait pas plus que nous, et que c’était une chose incompréhensible.

À propos des anciens Comtes, aujourd’hui Ducs de Saulx, et surtout à propos d’histoires de portes, je vous dirai qu’une cousine à moi, qui s’appelait Marie-Casimire de Froulay-Tessé, avait épousé Charles-Gaspard de Saulx-Tavannes, lequel était le petit-fils de cette mystérieuse. Marie-Casimire fut inhumée dans les caveaux de la Sainte-Chapelle de Saulx-le-Duc le 18 août de l’année 1752, deux ou trois fois vingt-quatre heures après la déclaration de son décès. Il arriva dix-huit mois après, qu’on eut besoin de rouvrir ces mêmes caveaux pour y déposer le cercueil du Chevalier de Tavannes, oncle de son mari. On fut surpris d’abord, ensuite on fut épouvanté d’éprouver pour en ouvrir la porte une résistance inexplicable. À force de résolution laborieuse, on vint à bout de la faire tourner sur ses gonds de pierre, et l’on entendit pour lors un sinistre bruit d’ossemens qui roulèrent sur les degrés depuis la porte qu’on ouvrait jusqu’au fond du sou-