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Page:Créquy - Souvenirs, tome 10.djvu/225

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d’en avoir son advis, qu’il ne donnoit jamais que mal volontiers, disant qu’il n’estoit nulle autre chose qu’homme de guerre, et bien qu’il fust en effet un des plus advisez personnages de son temps ; cas estrange en un Seigneur du pays de Gascogne et plus estrange homme, en vérité, car il estoit d’esprit subtil et délié quoique rudement acerbe et bouillant, sous sa tocque noyre à l’antique, avec un air seigneurial et de franc-voulloir qui sentoit parfaitement sa bonne mayson. Comme il estoit cruellement impétueux dans sa vindicte et néantmoins de générosité merveilleuse et dont on savoit mille traicts, feu l’Admiral de Coligny l’appeloit le Lion Catholique, et Monsieur le Chancelier de l’Hospital me dizoit un jour de lui : C’est un homme à moytié de pur or et de fer ardant. » L’histoire de France n’a pas manqué de recueillir et d’enregistrer une anecdote de sa vie. C’étoit à Paris, pendant les exécutions de la Saint-Barthélemy ; et c’étoit a l’egard du Baron de Reyniès (Tobie de Pestels de Caylus). Mais il vaut mieux laisser discourir, sur le vieux serviteur des Valois, l’honnête et judicieux Mézeray, qui va réciter cette aventure avec la simplicité de son temps, la familiarité de son vieux style et sa gravité naïve  : « J’avois presque obmiz d’écrire une des plus généreuses actions quy se soit jamais faites, et qu’on ne sauroit recommander à la posterité avec assez d’honneur et de louanges. Il y avoit deux gentilshommes de Quercy, Vesins, catholique et Lieutenant du Roy dans cette province, et Reigniers, huguenot et Lieutenant pour les Princes au même endroit : tous