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SOUVENIRS

— Signor Marto, lui dit-on, les messes de la cathédrale ne sont qu’à douze taris la pièce. On dit que le chevalier Feltri a été poignardé ; faites-en dire une vingtaine pour le repos de son ame et n’en parlons plus. Le reste de la soirée fut assez gai.

On disait aussi qu’un autre jour, un domestique inconnu était venu lui proposer de le suivre à la porte de la ville, et qu’il y trouva un homme âgé, très-bien mis et accompagné par quatre valets à cheval. Le même seigneur lui dit : — Maestro Marto, voici deux bourses de cent scudi : je vous prie de venir avec moi jusqu’à mon château, mais ne vous refusez pas à ce que je vous fasse bander les yeux. — Volontiers, répondit l’autre, et après une heure de marche, ils arrivèrent au vieux château du Duc d’Andria, comme on l’a su quelque temps après.

On détacha le bandeau qui couvrait les yeux du bravo, lequel se vit dans une chambre superbe, où se trouvait une jeune femme attachée sur un fauteuil, et baillonnée par une poire d’angoisse, de manière à ne pouvoir pousser que des cris inarticulés.

Le vieux Seigneur lui dit : — Mio bravo, je vous dirai que mes valets ne sont que des poules mouillées ! et vous saurez que je n’ai plus le poignet assez vigoureux pour porter un coup assuré. En conséquence, ayez la complaisance de poignarder ma femme.

Domenico lui répondit : — Excellence, on vous a trompé sur mon compte. J’attends des gens (qui