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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

Nous nous arrêtâmes à Lyon, chez M. Giraud, Banquier de la Cour de Rome en France, et beau-frère du Prévôt des marchands, qui, comme à Paris, est le premier officier municipal de cette grande cité, et qui reçoit, comme à Paris, des lettres de noblesse en entrant en charge. Il m’a toujours semblé que cette élection des maires dans les bonnes villes était la meilleure manière d’acquérir la noblesse, et je fais un tout autre état de ces bonnes familles de la haute bourgeoisie qui nous sont agrégées par l’élection de leurs pairs, en vertu de l’estime et par la considération qu’on leur porte et comme un libre aveu de leur primauté dans leur pays, que non pas de ces promotions vénales, ou de ces concessions accordées par la faveur et arrachées par l’intrigue. On ne saurait nombrer les anoblissemens indignes obtenus sous la régence. L’abbé Dubois en a fait un trafic honteux, et c’est une chose à jamais déplorable !

M. Giraud descendait d’un intendant de mon grand-père, qu’il regardait comme le premier auteur de sa fortune, et nos deux familles en gardaient un souvenir bienveillant. Mme Giraud s’apprêtait à faire ses couches et j’acceptai bien volontiers le poupon qu’elle attendait pour mon filleul. C’est un enfant à qui l’on a vu jouer dans le monde un très grand et malheureusement un trop grand rôle. J’aurai l’occasion de vous reparler de Monseigneur Giraud, Nonce apostolique à Paris, et puis Cardinal-Secrétaire-d’État sous le règne de Pie VI. Souvenez-vous donc qu’il était mon filleul ; je pourrais bien oublier que je vous ai déjà parler de lui, et je