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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

parler pour une affaire indispensable. J’étais en colloque avec tous les Sully, les Charost et les Montmorency du pays, pour un conseil de famille, et j’ordonnai qu’on le fit entrer dans mon oratoire, où je le trouvai qui disait l’office du Saint-Esprit dans un bréviaire de l’ordre, qu’il avait découvert sur mon prie-Dieu. Il me fit signe de ne pas l’interrompre… J’ai su depuis que cette pratique, dont il était venu s’acquitter dans mon oratoire, était la suite d’un arrangement qu’il avait fait avec le frère de Mme de Maintenon, le vieux Comte d’Aubigné, qu’il assistait à la mort et qui se tourmentait beaucoup de n’avoir pas dit son office du Saint-Esprit depuis je ne sais combien d’années, quoiqu’il eût fait le serment de le réciter chaque jour, en exécution des statuts de l’ordre, et quand il avait reçu le collier, à la fameuse promotion de 1688. C’était donc pour le soulagement de sa conscience et la paix de ses derniers momens que le bon Curé lui avait promis de dire à son intention l’office du Saint-Esprit jusqu’à la fin de ses jours ; et vous voyez qu’il y procédait charitablement sitôt qu’il en trouvait l’occasion. Les curés et les notaires de Paris sont, comme chacun sait, les deux corporations les plus estimables du royaume ; mais ce Curé de Saint-Jean, qui s’appelait l’Abbé Duhesme, était la fleur des saints. La quantité des aumônes et des restitutions qu’il faisait opérer et qui lui passaient par les mains était prodigieuse. Je ne doutais pas qu’il ne voulût me parler du fidéi-commis de sa pénitente et du légataire de M. de Poitiers ;