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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

Ce n’est pas encore là ce que M. de Villette avait souffert et commis de plus déshonorant.


Il est malheureusement vrai que l’exercice de la puissance et l’excès de la prospérité, les mauvais exemples, les flatteries, les lâches condescendances peuvent dénaturer les plus belles âmes et peuvent égarer les meilleurs princes. J’ai voulu mener mon fils à la revue de la maison du Roi, plaine des Sablons. On y voyait la Maréchale de Mirepoix (cousine de la Sainte-Vierge), tête à tête, avec Mme Dubarry, dans un large carrosse à panneaux blasonnés, avec le cri des anciens Barrymore : Boutez-en-Avant. J’ai fait tourner bride à mon équipage, et je suis rentrée chez moi si honteuse et si consternée que j’en ai fait fermer ma porte et que j’en ai larmoyé d’humiliation.


Le Procureur-général au Parlement de Provence est assurément un magistrat digne de confiance et digne de foi. Il vient d’écrire au Ministre de la maison du Roi pour lui dénoncer et lui certifier ce qui suit :

« Un gentilhomme de cette province, appelé M. de Sade, allait être décrété de prise de corps pour accusation de rapt et de violence. Il s’était enfui par Nice ; ses fermiers ont profité de son absence pour faire écouler l’eau d’un étang qui les incommodait et qu’il avait défendu de pêcher. On vient d’y trouver le corps d’un jeune homme et celui d’une jeune fille qui sont piqués comme des perdrix, la jeune fille avec du lard et le jeune