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SOUVENIRS

poème de la Henriade, Voltaire avait avancé que le Roi Charles IX avait tiré des coups de carabine sur les huguenots qui s’enfuyaient du quartier du Louvre, à l’heure de la Saint Barthélemy, et la preuve qu’il en donnait c’est que le Maréchal de Tessé aurait connu le gentilhomme qui avait chargé cette carabine du Roi Charles à plusieurs reprises, et lequel gentilhomme ordinaire de Charles IX en aurait fait confidence à ce Maréchal au bout de 90 ans.

Il faut vous dire que Voltaire ne s’était jamais trouvé une seule fois dans sa vie avec mon oncle de Tessé, et qu’il ne savait autre chose de lui que ce qu’il pouvait en attraper en nous questionnant, et, s’il faut tout dire, en m’impatientant quelquefois par ses questions. Je dois déclarer que le Maréchal de Tessé n’a jamais rien dit de semblable à ceci devant aucune personne de sa famille, et j’en parlai si haut et si clair que Voltaire en a supprimé cette fausse indication dans toutes les éditions suivantes[1].

  1. La Convention, le Directoire et le gouvernement des Consuls n’ont voulu tenir aucun compte à Voltaire de cette correction dans les notes de son poëme, et de son amende honorable en désaveu tacite. On voit encore en cette présente année 1802 l’inscription suivante au-dessous d’une croisée de la galerie du Louvre au rez-de-chaussée (les caractères en ont au moins deux pieds de hauteur) :

    « C’EST DE CETTE FENÊTRE QUE L’INFÂME CHARLES IX, D’EXÉCRABLE MÉMOIRE, A TIRÉ SUR LE PEUPLE AVEC UNE CARABINE. » Comme cette partie du Louvre n’a été construite que sous le règne d’Henri IV, il est difficile que cette fenêtre ait existé du temps de Charles IX ; mais nous n’en sommes pas à faire des chicanes aux inscriptions pariétaires de la république.

    (Note de l’Auteur.)