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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

Clermontn prince du sang royal, mais simple cadet de la branche de Condé, prendre sans contestation le pas et la droite sur le duc de Bavière, électeur souverain de L’Empire et l’aîné de cette famille impériale. Enfin j’ai vu les trois princes royaux de Saxe et de Pologne dîner et souper à Versailles à la table dut premier maître de l’hôtel, parce que le cérémonial français ne leur accordait, pas l’honneur de pouvoir manger ostensiblement, non pas avec le Roi, ce qui va sans dire, mais avec Madame la Dauphine, qui était leur propre sœur. Il est vrai que nous avons MM. de Grillon et de Coigny parmi nos ducs ; mais, du moins, les auteurs de ces deux familles étaient de vaillans guerriers et d’illustres capitaines ! Les princes de l’Empire en pourraient-ils dire autant des leur prince Fugger, qui n’est que le petit-fils d’un riche banquier[1] ?

  1. Plusieurs écrivains du seizième siècle ont rapporté que le banquier Chigi, auteur de cette maison romaine, avait fait servir un jour À Léon X une collation dans laquelle il se trouvait un plat de cervelles de paon et un plat de langues de perroquet. À la même époque, le banquier Fugger brûla, sur un fagot de cannelle qu’il avait fait allumer dans une chambre où il donnait à coucher à l’Empereur Maximilien, pour deux cent mille florins d’obligations souscrites par Sa Majesté Césarienne au profit des frères Fugger et compagnie. À présent les Chigi sont Princes romains, et les Fugger sont Princes de l’Empire ; Qu’on nous dise, à nous autres Français, ce que sont devenus les descendons des Zamet et des Particelli, des Goullut, des Paris et des Beaujon. La France est un pays où l’argent n’a jamais pu suppléer à la noblesse ; aussi je ne sache pas qu’il existe en France une seule famille qualifiée qui soit provenue du comptoir. La sacristie, la caserne et les audiences