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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

Ce qu’il y avait d’aussi magnifique et de mieux assorti dans cette belle parure de Mme d’Egmont, c’était que les fermoirs de ses bracelets, l’agrafe de son collier et l’attache de son aigrette (où l’on voyait jouer quarante perles pendeloques du plus beau profil et du plus bel orient) étaient formés par des hyacinthes immenses, étincelantes, éblouissantes et de la plus belle couleur de capucine. Parmi les pierres les plus précieuses, j’ai toujours ouï dire qu’après la tourmaline et le béril, il n’était rien de si rare et de si précieux que les hyacinthes de la vieille roche.

Je demandai a Septimanie comment il se faisait qu’elle eût mis un grand habit à fond noir, un jour de fête ? C’était parce que M. d’Egmont l’avait désiré, me dit-elle, attendu qu’il était Condé Pariente de Portugal, et que le deuil de la Reine Dona Marianne n’était pas terminé pour lui. Comme je voulais faire honneur à votre famille et n’avoir pas l’air de la duègne de l’infante à côté de Mme d’Egmont, sur qui j’avais toujours soin de prendre le pas, vu la parité du rang et la priorité d’âge, j’avais mis un très-bel habit de cour en étoffe brochée de trois nuances de bleu, dont la plus sombre était le bleu de lapis qu’on appelle à présent œil de roi. J’avais les plus beaux falbalas du monde en dentelle d’argent ; enfin j’avais eu soin d’exhiber tous les diamans de votre couronne cygnale[1].

  1. L’intention de cette métaphore aristocratique paraît être allusive aux armes de Créquy, dont la couronne héraldique était fermée par trois cols de cygne d’argent embecquant un anneau