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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

sa partie, et qu’il avait eu les larmes aux yeux pendant toute la soirée.

À propos de la Maréchale de la Tour-Maubourg, je vous dirai qu’elle ressemblait tellement à la Maréchale de Balincourt que leurs enfans s’y trompaient et que la Princesse de Tingry (Louise de Fay), qui était jeune fille alors et qu’on venait de faire sortir du couvent, les prit une fois l’une pour l’autre. Comme elles avaient aussi les mêmes insignes, environ les mêmes armes, et tout à fait les mêmes couleurs de livrée, il en arrivait continuellement des coq-à-l’âne entre les marchands et les laquais. Il me semblait que le Maréchal de Balincourt aurait bien voulu faire en sorte que la Maréchale de Maubourg voulût s’y laisser tromper. Il se plaignait de ce que sa femme était naturellement désobligeante, et l’on disait que Mme de Maubourg aurait été de meilleur procédé. — Voyez donc comme elle est sèchement contrariante ! disait-il de sa Maréchale, et pourtant je ne l’en aime pas moins ; je ne voudrais pas l’échanger contre deux pareilles ! Il avait l’air d’un Caton, mais le diable n’y perdait rien.

On apprit, quelque temps après la mort de Damien, que le corps municipal et les bourgeois d’Amiens sollicitaient du Roi la faveur de changer le nom de leur ville en celui qu’il plairait à S. M. de vouloir adopter ; et néanmoins, ils prenaient la liberté de lui proposer celui de Louisville. C’était M. Gresset, leur concitoyen, qui leur avait mis la chose en tête, et M. Nicolaï, leur intendant, ne manqua pas d’en faire sa cour, en écrivant là-dessus lettres sur lettres à MM. du Grand-Conseil. Il se