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SOUVENIRS

Le Maréchal d’Armentières et M. de Chauvelin avaient été frappés de mort subite en présence du Roi, dans son cabinet[1], et l’on découvrit que ce prince en avait conçu les pressentimens les plus sinistres.

Mme du Barry s’occupa de lui procurer des distractions bien dignes d’elle et bien indignes de lui, comme on peut croire… Il alla s’enfermer à Trianon pendant quelques jours, et l’on apprit avec effroi qu’on venait de le transporter à Versailles parce qu’il avait gagné la petite-vérole. La première chose que fit S. M. quand elle fut établie dans son appartement, ce fut d’ordonner qu’on n’y laissât pas entrer M. le Dauphin ni sa famille ; ensuite elle dit à M. de Duras : — Je vous prie d’envoyer prévenir la Duchesse d’Aiguillon qu’elle me ferait plaisir d’emmener la Comtesse du Barry hors du château : je craindrais qu’elle n’y fût insultée, ce qui serait fort injuste, attendu qu’elle n’a jamais fait de mal à personne. J’ai peur qu’on ne la rende malheureuse, et je la recommande à votre attachement pour moi.

Jamais le Roi ne s’était exprimé de la sorte ; on

  1. Louis de Conflans-Brienne des Empereurs d’Orient, Marquis d’Armentières, Maréchal et Vice-Amiral de France, Chevalier des Ordres, etc., né en 1711, mort en 1774.

    Claude-François Chauvelin, Seigneur du Marquisat de Grosbois, ancien Ambassadeur de France à Gènes, etc. La république de Gènes l’avait fait inscrire au livre d’or de sa noblesse en 1700, ce qui fit tant de peine au vieux Prince de Monaco, Noble génois, qu’il en mourut d’apoplexie en apprenant cette fâcheuse nouvelle.

    (Note de l’Auteur.)