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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

une telle considération, que j’adresse toujours quelques mots d’excuse à cette jeune femme avant de me laisser placer au dessus d’elle[1]. Voici M. le Président le Boulanger, lequel est beaucoup plus fier de ce surnom populaire que de son vieux nom seigneurial de Montigny[2]. Voilà M. Potier de Novion, de la même famille que les Ducs de Gèvres, et simple conseiller à la cour des aides. Ce petit jeune homme à l’air si chétif et la mine si grave, est M. de Nicolaï, Premier Président de la chambre des comptes ; il a déjà quatorze enfans, et ce qui ne vous surprendra pas moins, c’est que la frère cadet de son père est Maréchal de France ! Quant à ce grand Abbé si sec et si droit, à qui vous voyez

  1. Voltaire avait omis de parler, dans la Henriade, de ces vertueux magistrats qui furent suppliciés en 1591, et notamment de Barnabé Brisson ; ce qui tenait fort à cœur au vieux Baron de Breteuil, dont ce Premier Président était l’ancêtre maternel. Mme du Châtelet, fille de M. de Breteuil, en parla vraisemblablement dans les mêmes termes, et Voltaire introduisit dans son poëme les quatre vers suivants :

     « Vous n’êtes point flétris par ce honteux trépas,
    Mânes trop généraux ! vous n’en rougissez pas ;
    Vos noms toujours fameux vivront dans la mémoire,
    Et qui meurt pour son roi, meurt toujours avec gloire ! »

  2. Il est assez connu que Raoul de Montigny, Seigneur d’Hacqueville et capitaine des gardes du Roi Charles VII, avait nourri les malheureux Parisiens pendant l’hiver et la famine de 1439 ; il avait engagé toutes ses terres afin d’envoyer acheter des grains en Flandre. Le Roi l’en récompensa par la dignité de Grand-Pannetier de France, et le peuple de Paris par le surnom du Boulanger, que l’aîné de la famille de Montigny a toujours porté depuis ce temps)là.
    (Note de l’Auteur.)