Page:Créquy - Souvenirs, tome 5.djvu/20

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
16
SOUVENIRS

avec une honnête et discrète Mancelle appelée Mme Lescombat. — Comment, disait-il, n’avez-vous jamais ouï parler ici de Mme Lescombat ? Elle est si gracieuse et si bien stilée qu’on dirait une dame de Paris ; elle est de la réserve et de la douceur les plus aimables ; elle est très bien mise, et j’ai remarqué qu’elle est très soigneuse pour toutes ses petites affaires. Enfin c’était un miroir de perfections. — Je l’irai voir au Mans, sous deux mois d’ici, quand j’aurai fini ma cure et que j’aurai pris mes bains de vendange. Elle m’a donné son adresse, et je ne manquerai pas de faire le voyage à dessein de la visiter. Le messager nous a dit qu’elle avait au moins cinquante ans ; mais elle n’en est pas moins charmante !… Et le voilà parti pour le Mans quand il eut fini sa cure et qu’il eut grappillé plus de raisin dans les vignes d’autrui que tous les clercs et les séminaristes en vacances, et tous les renards du pays, sans compter les grives. Il revint à Montflaux trois jours après ; mais il avait l’oreille basse, et votre père lui demanda si c’était que Mme Lescombat ne l’avait pas reçu bien poliment. — Hélas ! nous dit-il, vous n’avez pas d’idée d’une aventure pareille à celle-ci ! J’arrive au Mans ; je demande la maison de cette dame : on me rit au nez ; j’insiste, et je trouve un honnête mendiant qui me conduit à sa porte. Jolie maison, par ma foi ! avec un balcon sur la rue ; mais tous les contrevens étaient fermés. Je m’en inquiète ; je heurte à la porte, et je finis par y frapper à tour de bras. Alors il est arrivé une grosse servante qui m’a dit que, si je voulais voir Mme Lescombat, je n’avais pas une