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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

quait jamais de se faire prêter des diamans par son père, et qu’ensuite il s’arrangeait avec Boehmer, qui prêtait ces diamans à loyer et qui lui réservait les deux tiers de son profit. Je n’ai su qu’en penser et M. de Penthièvre ne le croyait pas ; mais, de toutes les bassesses dont son gendre était capable, celle-ci n’aurait pas été la plus inconcevable et la plus révoltante[1].

Toute la journée du lendemain fut employée à débarrasser la place et la rue Royale des cadavres dont elles étaient couvertes, et à les transporter dans le cimetière de la Madeleine pour les y faire reconnaître par leurs parens ou leurs amis. On apprit que Madame la Dauphine, ainsi que Mesdames, filles du Roi, étaient venues de Versailles jusque sur le Cours-la-Reine, et qu’elles avaient rebroussé chemin en apprenant les malheurs qui venaient d’arriver. M. de Sartines m’a dit qu’il avait reçu du Roi, du clergé, des Princes, de la Noblesse et jusque des fermiers-généraux, plus de deux cent mille francs, qu’il avait fait distribuer aux familles les plus malheureuses.

On apprit aussi que M. Bignon, après avoir vu l’effet et le succès de son joli feu d’artifice, était rentré chez lui, dans son carrosse, à dix heures du soir ; qu’il s’était couché, suivant son habitude, à onze heures précises, et qu’il avait dormi paisiblement jusqu’à huit heures du matin. Le surlende-

  1. Vous, verrez que ce même Boehmer a joué un grand rôle dans le procès du collier, dont il se disait co-propriétaire.
    (Note de l’Auteur.)