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Page:Créquy - Souvenirs, tome 5.djvu/81

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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

C’est bien assez pour opposer à des coups d’éventail.

M. de Mairan mourut le plus chrétiennement possible, assisté de Mme Geoffrin, qu’il avait instituée sa légataire universelle et qui recueillit environ cent mille écus de cette succession. Il est vrai qu’elle en a rendu quelque chose à M. d’Orthoux, neveu du défunt ; mais il est certain qu’elle a gardé le reste en disant que c’était pour le distribuer à des gens de lettres nécessiteux.

— Mon Dieu ! comme il a de l’ordre et comme il est rangé, Mairan ! disait souvent Mme Geoffrin. Je l’aime à cause de cela : l’ordre et l’arrangement sont les diamans de l’esprit. C’est une sorte de similitude ou de comparaison que je ne comprends pas, mais les encyclopédistes ont toujours dit que c’était admirable.


Le philosophe M. d’Argens était un Marquis de fabrique et de la même étoffe que MM. de Condorcet, d’Albaret, du Pourcet, de Luchet, etc. Chamfort avait dit, rudement pour eux, que les bureaux de l’Encyclopédie étaient devenus le Pont-aux-ânes, que c’était dans la salle à manger de Mme Geoffrin que se tenait le Marché-aux-veaux, et que le cabinet de M. d’Holbach était la Foire-aux-marquis. Il faut convenir que MM. les Ducs ont été bien heureux de ce que le Roi s’était réservé l’application de leur titre, car chacun de ces anoblis n’aurait pas manqué de se faire appeler philosophiquement Monsieur le Duc.