C’était donc le plus naturel et le plus simple qui
était devenu le plus à la mode. On voyait des
femmes et des maris qui s’embrassaient ; on entendait
des frères et des sœurs qui se tutoyaient : les
Dames ne se reconduisaient plus entre elles et ne se
levaient plus pour se saluer. On disait des femmes
au lieu des Dames, et les hommes de la cour au lieu
des Seigneurs. On invitait à souper en pêle-mêle
avec les plus grandes Dames, des femmes de finance,
et par exemple une petite Mme de Favantines, qui se
précipitait dans les salels à manger, en rudoyant et
coudoyant la Baronne de Montmorency et la Princesse
de Léon, la Comtesse de la Châtre et le Duchesse
d’Agenois, lesquelles ne s’aimaient guère et
se donnaient toujours le bras, parce que de l’union
vient la force, apparemment ? On se plaçait à table
comme on l’entendait ; chacun tranchait à sa guise
et mangeait à son gré de ce qu’il avait devant soi ;
enfin, toute chose était devenue d’une simplicité si
naturelle, que la Princesse Victor de Broglie s’était
brûlé cruellement, et qu’elle avait failli s’estropier,
en voulant détacher avec ses ongles une aile de perdrix
qui se trouva trop chaude[1]. Votre tant de
Clermont-Tonnerre ne manquait jamais de retour-
- ↑ Sophie-Rose de Rozen, alors belle-fille du Maréchal de Broglie, et femme en deuxièmes anoces de M. René-Marc de Voyer de Paulmy, ci-devant Marquis d’Argenson, lequel est aujourd’hui secrétaire de la Société des Droits de l’homme. M. le Duc de Broglie, notabilité doctrinaire est le fils de Mme d’Argenson et du citoyen Victor Broglie, son premier mari.(Note de l’Éditeur.)