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SOUVENIRS

ledit million ne pouvait être considéré judiciairement comme ayant aucun rapport avec celui de Livardez. Mon premier avocat me conseilla fortement de faire assigner les Ferraz à l’audience de Séville, et je n’y manquai pas. J’ai plaidé contre eux pendant six ans ; il m’en a coûté soixante mille piastres fortes ; enfin j’ai perdu mon procès devant le conseil suprême de Castille et les deux millions me sont resté.

« J’ai d’abord eu l’idée d’en faire quelque fondation charitable, mais j’ai eu peur que le mérite ne s’en trouvât réparti sur ces maudits Ferraz. En attendant, quand je fais mon bilan général, à la fin de chaque année, je mets toujours ces deux millions de moins dans mon actif.

« Vous voyez, mon fils, si j’ai de bonnes raisons pour vous interdire toute espèce de rapports avec une maison par qui la nôtre a souffert des contrariétés si nombreuses et si mortifiantes ! »

À présent moi, soussignée Victoire de Froulay, douairière de Créquy, je vous dirai que M. d’Aranda m’a certifié que ce débat judiciaire entre les pointilleux Soarez et les honorables Ferraz était le chose du monde la plus véritable, et sur tous les points du rapport ci-dessus qui fut publié dans plusieurs journaux du temps, et notamment dans la Gazette de Leyde, au mois de février 1747. Ce fut là un bon exemple à mettre sous les yeux des Hollandais, ajoutait le Comte d’Aranda qui avait été plénipotentiaire d’Espagne en Hollande, où le Stathouder Guillaume avait fait vendre la vache et la couchette d’une pauvre femme qui lui devait quatre