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SOUVENIRS

apercevait quelquefois à l’hôtel de Choiseul ; mais on ne se souciait pas de les voir chez soi, parce que la Duchesse de l’Infantado ne les recevait point, et surtout parce qu’ils allaient trop souvent chez les d’Holbach et la demoiselle Lespinasse. Ils allaient aussi chez Dalembert, et recevaient Diderot ; ce qui était la plus mauvaise compagnie possible pour des Espagnols, et ce qui paraissait effrontément philosophique.

Aussitôt que M. d’Aranda fut nommé Président du conseil de Castille, il fit revenir son ami d’Olavidez en Espagne, afin de lui confier la direction d’une colonie qui s’appelait la Carlotte, et qu’on voulait établir dans la Sierra-Morena. On apprit, quelques années après, qu’il avait été pourvu de l’Intendance de Séville : mission de confiance, et témérité qui scandalisa beaucoup les vieux Castillans ! Au reste, M. d’Aranda proférait souvent un apophthegme qui suffirait pour mettre à l’abri, dans ces sortes de nomination, la responsabilité morale du Roi Charles III. — El si, el no suon del ministro, disait-il ; El como y el quando, del oficial ; La mesa y el papel, de la ncion ; La pena y la tinta, del Rey. Le oui ou le non viennent du ministre ; le quand et le comment, du commis ; le pupître et le papier, de la nation ; le Roi n’y met du sien que la plume et l’encre. Je me souviens d’avoir entendu dire qu’en recevant le paquet qui devait contenir sa nomina-

    d’Ouraque ; il fit écrire au Roi son neveu qu’il aimerait mieux la Princesse Blanche, sa fille cadette ; et celle-ci fut la mère de Saint-Louis.

    (Note de l’Auteur.)