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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

de ses juges, et qu’il n’était resté cloué sur la croix que pendant trois heures, ce qui fit que tous les juges et les auditeurs éclatèrent de rire, et qu’on le renvoya comme un fou. Il s’en retourna tranquillement dans le haut de son clocher des Carmes, rue de Vaugirard, où il avait établi son domicile, et je pense qu’il y demeure encore. C’était la Comtesse de Kercado (la Malézieu) qui s’était chargée de pourvoir à sa subsistance, et 24 francs lui duraient trois mois.

Le saint Abbé de Fénelon fut repris en sous-œuvre, un malheureux jour où les Savoyards ne se doutaient de rien, et il fut conduit à l’échafaud sur la même charrette que Madame Élisabeth de France et que la Maréchale de Noailles. — Monsieur le bourreau ! monsieur le bourreau ! cria celle-ci, arrêtez un moment pour me détacher les mains, laissez-moi prendre mon flacon, je vous en supplie, laissez-moi prendre mon flacon, la Princesse va se trouver mal !… C’était au bout de la rue royale, et il est vrai que Madame Élisabeth avait paru prête à s’évanouir en voyant la place Louis XV, où le Roi son frère et sa belle-sœur avaient été suppliciés. Voilà ce qui fut mis dans un journal du soir en dérision de cette pauvre Maréchale de Noailles[1].

  1. À l’instant où la même charette passait en face du Palais-Royal, il en sortait deux hommes dont l’un dit à l’autre : — Je ne suis pas moins révolutionnaire que vous, mais je trouve que ceci passe toute mesure. Je ne crois pas que l’existence de cette femme serait en rien d’inquiétant pour l’établissement, ni pour le maintien de la république. Il est à prévoir que la nation