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SOUVENIRS

vention nationale avait décrété la peine de mort à l’égard de tous ceux qui correspondraient avec un émigré, qui donneraient asile à un prêtre réfractaire, ou qui dissimuleraient une partie de leur fortune, à dessein de ne pas contribuer équitablement à la taxe imposée pour soulager les indigens (il n’était plus question de pauvres ; c’est un mot qui sentait le fanatisme et puait l’aristocratie).

En exécution de la loi du 23 août proposée par Barrère, on avait décidé que tous les Français devaient être en état de réquisition permanente, attendu que la nation française était dans l’obligation de se lever en masse pour défendre la Convention. Les citoyens non mariés ou restés veufs sans enfans depuis l’âge de dix-huit ans jusqu’à vingt-cinq devaient marcher les premiers, et l’on appellerait tous les individus plus âgés, successivement, et suivant les besoins de la république. Il y avait des fabriques d’armes établies dans presque toutes les églises de France. Toutes les terres avaient été frappées d’énormes contributions en nature, à dessein de former des approvisionnemens pour une armée de douze cent mille vokontaires. Tandis que les jeunes citoyens iraient à la rencontre de l’ennemi, les hommes mariés devaient charroyer les subsistances et forger les armes ; les femmes se réuniraient pour fabriquer des gibernes et des chaussures, ou serviraient dans les hôpitaux, et les enfans s’amuseraient à faire de la charpie ; enfin les vieillards auraient soin de se tenir dans les places publiques et d’y haranguer leurs concitoyens pour enflammer les courages et pour exciter la haine des rois. L’emploi