leur mordait les cuisses en protestant contre une volonté qui n’était pas la sienne. Toutefois, après avoir étudié la sphère armillaire et le blason, après avoir lu Plutarque et les mémoires de Mademoiselle de Montpensier, cette petite personne voulait bien prendre le soin d’éplucher des herbes et d’écumer le pot. À l’âge de huit à dix ans elle descendait quelquefois l’escalier toute seule, à ce qu’elle, nous dit ; c’était ordinairement pour acheter de la salade et des ciboules ; mais elle savait mettre à ces sortes d’emplettes une telle dignité, qu’elle était déjà, pour les fruitières et les marchandes de légumes, un personnage imposant. Voilà ce que Mme Roland nous présente comme un heureux mélange d’études graves, d’exercices agréables et d’occupations domestiques qui l’ont rendue propre à tout.
Elle ne tarda pas à faire connaitre à ses parens combien il lui paraissait insipide et dégoûtant de s’adonner aux arts mécaniques ; on n’osa pas la contraindre à friser des étuis, et dès qu’elle arrivait de la promenade, elle se retirait dans un cabinet pour lire, écrire et méditer.
Elle avait, du reste, l’œil doux et fier, le sourire tendre et séducteur, l’attitude ferme et gracieuse, la démarche rapide et légère ; et Mme Roland nous confie qu’elle était si parfaitement agréable à ses propres yeux, qu’elle se trouva presque heureuse d’avoir été mise en prison, parce qu’elle pouvait s’y considérer plus à loisir et s’y contempler sans distractions.
Il parait que Mme Roland n’avait pas toujours été stoïcienne, et pendant sa première jeunesse elle était