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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

dans laquelle nous nous trouvions ; il donna un reçu de nos personnes ; il dit très haut que nous allions être conduites en prison, et congédia ainsi ceux qui nous avaient amenées. Se trouvant seul avec nous, il nous assura de son intérêt, en nous promettant qu’à la chute du jour il nous ferait reconduire chez nous. En effet, sur les huit heures et demie du soir, il nous donna deux personnes sûres pour nous conduire, et nous fit passer par une porte de derrière, pour éviter les espions qui entouraient sa maison. Nous arrivâmes chez la Duchesse de la Vallière, grand’mère de Mme de Tarente, et chez laquelle elle logeait. Je demandai à cette bonne Princesse de Tarente de ne la pas quitter pendant la nuit, et je me couchai sur un canapé dans sa chambre.

« À cinq heures du matin, pendant que nous causions ensemble de tout ce qui nous était arrivé, nous entendîmes frapper à la porte : c’était mon frère qui, ayant passé la nuit aux Feuillans, près du Roi, venait nous en donner des nouvelles, et me dire que la Reine avait demandé à ma Mère que je vinsse la rejoindre ; que le Roi en avait demandé la permission à l’Assemblée, qui l’avait accordée ; que dans une heure il viendrait me chercher pour me conduire aux Feuillans. Cette nouvelle me fit un sensible plaisir ; j’était heureuse de me retrouver avec ma Mère et d’unir mon sort au sien et à celui de la famille royale.

« À huit heures du matin j’arrivai aux Feuillans ; je ne puis assez vous dire quelle fut la bonté du