Page:Créquy - Souvenirs, tome 9.djvu/12

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d’une pareille interdiction, soit à cause de leur rang, du nom qu’ils portaient, de leur grade militaire et même à raison de leur âge, il y en eut qu’on menaça de leur donner des coups de sabre, et ce furent Messieurs d’Havrincourt et de Bethisy, notamment.

J’ai beaucoup souffert à Paris pendant sept années ; mais je n’échangerais pas ces sortes d’angoisses-là contre l’assujétissement à l’étranger, contre les misères et les humiliations, contre les outrages et les colères de l’émigration ! Qui n’a su l’odieuse conduite de la maison d’Autriche et de la maison de Saxe à l’égard de nos Princes ? Qui n’a pas souri de mépris en lisant cette insolente inscription qu’un prince allemand avait fait placer à la barrière de son parc.


Il est défendu aux vagabonds, aux juifs et aux émigrés d’entrer dans ce jardins[1]. Il est vrai que les émigrés riches étaient admis presque partout ; mais

  1. C’est ainsi que le chantre de la Pitié flétrit le caractère et la conduite du Landgrave de Hesse Cassel :

    D’autres ont des jardins, des palais somptueux,
    Le monde entier vient voir leurs parcs voluptueux ;
    Mais des pas d’un Francais l’on n’y voit pas l’empreinte.
    On craindrait que ces pas n’en souillassent l’enceinte.
    Ah ! les jardins pompeux et ces vastes palais
    Valent-ils un des pleurs taris par des bienfaits !
    Tombez devant ce luxe, altières colonnades,
    Croulez, fiers chapitaux, orgueilleuses arcades ;
    Et que le sol ingrat d’un ingrat possesseur
    Soit sec comme ses yeux et dur comme son cœur !