Page:Créquy - Souvenirs, tome 9.djvu/23

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

plus à complaire à leurs parens et leurs amis. — Ma fille ne comprend pas, me vient-il dire avec une régularité désespérante, elle ne comprend pas que je puisse avoir besoin d’un gentilhomme ! — Ma fille me refuse un gentilhomme, elle a ce courage là !… Mais j’ai pourtant l’habitude d’avoir un gentilhomme, et voyez donc si c’est la peine de s’en passer ? on peut en avoir un pour cinquante écus par mois, et même un bon gentilhomme !

— Croyez-vous, ceci lui dis-je ? il me semble qu’ils devraient être enrichis depuis 92 ?

— Ah c’est bien possible, à cause qu’on en a tant tué ; mais on pourrait bien aller jusqu’à deux cents francs pour un gentilhomme qui joerait au trictrac, et surtout s’il avait la croix de Saint-Louis ?

Nous sommes à la recherche d’un gentilhomme à cinquante écus par mois. Il y en a d’un entretien plus dispendieux, et surtout quand ils sont jeunes, à ce que dit la douairière de Monaco (qui ne saurait se passer d’un Écuyer de main)[1].

  1. Marie-Catherine Brignolé des Ducs de Gênes, veuve d’Honoré de Goyou-Grimaldi, Souverain Prince de Monaco, Rocquebrune et Manthou, Duc de Valentinois, etc. Je vous ai déjà dit qu’il était mort de douleur en apprenant qu’on venait d’inscrire le nom du Marquis de Chauvelin sur le Livre d’Or de Gênes. Vous voyez qu’il était susceptible, et d’autant plus que sa qualité de Noble-Génois était la moindre de ses perfections (nobilaires). Il avait conçu des attentions de M. le Prince de Condé pour Mme de Monaco, une telle rancune qu’il avait fait ériger dans sa ville princière un monument, disons le mot propre, un gibet, où l’on voyait suspendue l’ef-