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pendant la route ne cessa de saluer et de sourire, rencontrant à chaque instant des promeneurs de sa connaissance qui regardaient généralement George avec une certaine curiosité. Celui-ci en avait déjà vu quelques-uns, mais n’avait jamais parlé à aucun, et se trouvait même assez honteux de ne pas connaître tout le monde. Quand il était seul, cette pensée ne lui venait pas, mais les sourires et les saluts incessants de sa cousine lui prouvaient vivement la différence qui existait entre la position sociale de Totty et la sienne. Il se demanda si jamais l’abîme serait comblé, et si dans un temps à venir tous ces gens qui le regardaient alors d’un œil curieux seraient aussi désireux de le connaître et d’être reconnus de lui qu’ils semblaient à présent satisfaits de connaître Totty et d’être salués par elle.

« Franchement, vous souvenez-vous réellement des noms de tous ces gens-là ? demanda-t-il bientôt.

— Pourquoi pas ? Je les connais presque tous depuis mon enfance. Vous apprendriez leurs noms bien vite si vous vouliez vous en donner la peine.

— Pourquoi faire ? Je ne ferai jamais partie de leur existence.

— Qui sait ? Cela ne tient qu’à vous. Je ne cesse de vous le dire. Le monde ne recherche jamais qui ne le recherche pas, et il ne donne que pour recevoir.

— Il me faudrait des raisons pour aller dans le monde… »

Mme  Trimm se mit à rire, baissa son ombrelle, et tourna la tête de façon à voir la figure de George.

« Des raisons ! s’écria-t-elle. Personne ne vous demandera vos raisons, pourvu que vous ayez de bonnes manières.