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exigeante et tière, elle le veut entier, complet : elle veut, qu’il soit, pour lui comme pour elle, non pas un moment de la vie, mais le principe vital. Elle veut changer en une réalité le nom de caresse : « Anima dell’anima mia ! »

Il est vrai que l’amour avait tout donné à Anne-Charlotte. En son pays de Suède, malgré les conquêtes du féminisme, elle avait eu peine à obtenir dans son ménage le droit à l’activité littéraire. Ici, près d’un homme amoureux, fier de son talent, elle trouvait, non seulement la sympathie, mais une aide intellectuelle. Elle travaillait avec son mari la littérature latine, elle lisait Dante, Ariosto, Leopardi, Carducci et les poètes modernes italiens. Dans cet esprit ouvert et varié,, une telle culture devait porter de beaux fruits.

Mais le bonheur d’Anne-Charlotte s’était élevé trop haut : la foudre tombe sur les cimes. En pleine joie déjà, alors qu’elle attendait son enfant, des pressentiments l’avaient troublée.

« Souvent, je sens en moi une grande angoisse. Il me semble que notre bonheur est trop complet, trop intense pour que cela puisse durer, et je crois ou que je vais mourir, ou que l’enfant ne viendra pas bien au monde. »

Il vint cependant, beau et vigoureux ; la mère se remit à merveille et jouit pleinement de la première enfance :

« Les yeux de Gaëtano sont déjà si attentifs !