bonheur, avant le triomphe. Et voilà que tu parles de tes premières années, de ta campagne anglaise, d’un petit cimetière éparpillé dans le gazon autour d’une église. Ton adolescence triste sans cesse pensait à la mort, jusqu’au jour où, par hasard étant entrée dans une épicerie toute clinquante de réclames, par haine du Bovril et des chocolats Lyons, tu résolus de vivre.
Un beau matin une invitation d’Amie te décida de quitter ta rose maison d’orpheline. Adieu aux pelouses, aux murs chevelus de lierre. Tu ne leur laisses pas grand-chose de ton cœur. Il y a maintenant des années et des années, quand tu avais quinze ans, venait bien un garçon qui aimait à plonger ses doigts dans le feu de ta toison. Il est parti pour un voyage, et sous la Croix du Sud, il dort, devenu de marbre. Plus subtile que pinceau chinois, une maladie a eu raison de cette noire vierge qu’il appelait son avenir. Frères des poissons, des étoiles de mer, des coraux, la dentelle des nageoires effleure son grand rêve immobile et les écailles ne sont plus froides à son ventre blanc. Au fond de l’océan, sa tête est la plus précieuse des éponges pétrifiées et d’insaisissables colonnes de bulles d’air montent de sa bouche, ses narines au toit mouvant des flots.