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Page:Crevel - Babylone, 1927.djvu/173

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tion) un jour suive aussi digne, finalement aussi fidèle, son propre convoi.

Après Amie viennent les Mac-Louf, Madame discrète et résignée, le Révérend qui mâchonne le discours à prononcer tout à l’heure sur la tombe. La petite-fille du mort ferme le cortège familial, que prolonge le flot des délégations et des curieux.

Les cuivres de la fanfare municipale rappellent à l’assistance que la mort n’est point chose si triste. Du moins, pour un orphéon. Du moins, aussi, sans doute, pour une négresse, puisque tout contre un grand gars la catéchumène fugitive est là qui rit à pleines dents. Mais le Révérend, tout au souci de l’oraison à prononcer sur la tombe, ne voit point cette nique. Tant mieux, car de ses deux devoirs, il n’eût certes manqué d’oublier l’actuel, celui d’un gendre meneur de deuil, pour l’autre, celui du berger d’âmes. Alors, par la faute d’une paire d’yeux qui dansait drôlement dans un visage couleur de perle noire, il eût quitté la place que le protocole et Amie lui avaient assignée, et de ce coup, l’harmonie des funérailles eût été rompue. La sauvageonne, qui ne tient guère à se laisser ramener au bien, avait, il est vrai, pris ses précautions, et, tandis qu’elle s’amusait du char aux plumets brinquebalants et couronnes excessives,