Page:Crevel - Détours, 1924.djvu/91

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pour mes questions des subtilités de torture, nous sommes devant sa porte. La fraîcheur l’a calmée ; c’est elle qui m’invite à monter. « Vous allez me compromettre et sans profit ni pour vous ni pour moi ; mais comme demain je quitte Paris avec l’espoir de n’y jamais revenir, le mal ne sera pas grand. »

Avant de commencer son récit, comme si l’heure n’était pas en vérité très avancée, elle me fit les honneurs de son appartement, me montra les transformations, une toile de Jouy parme qu’elle avait découverte dans un vieux bric-à-brac et qui faisait si bien dans sa chambre, des conques pour enfermer les lampes de son studio. « Et dire que dans quelques heures il n’y aura plus de présence humaine parmi toutes ces choses familières. L’amour vraiment m’a rendue folle, Daniel »; un tiroir ouvert, elle y cherche une photographie de Cyrille en pied ; elle a dessiné les lignes du corps et les détails du sexe ; je conseille : « Gardez cette preuve de votre hystérie ; avec un tel document vous pouvez assassiner qui vous voudrez sans risque de condamnation.

— Stupide petit bourgeois ; vous n’entendez rien aux choses de la chair ; une femme amoureuse préfère à tout le corps de son amant. Comprenez ma joie, mon trouble ; demain pour toujours je vais reprendre cet amant. Si vous saviez comme je l’aime ; lorsque je l’ai connu, l’autre, mon compatriote l’Hindou au diamant noir venait de m’abandonner ; on m’avait de Vienne transportée dans un sanatorium. Cyrille y passait une convalescence. Il flirtait avec une Anglaise, une cousine de son beau- père. Cette femme avait été très belle ; la maladie la creusait mais