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Page:Crevel - L’esprit contre la raison, 1927.djvu/44

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et d’entonner ses thrènes. Ni le frisson extraordinaire, ni les produits connus de l’anxiété, ni l’histoire pitoyable du Lusitania, ni aucun des spectacles où il est d’une telle facilité de nous convier à nous apitoyer et qui, dans leur plus terrible désolation, demeurent tout de même du domaine relatif, ne sauraient être invoqués comme preuves ou causes d’une crise de l’esprit.

Crise de l’esprit ? Le symbole est bien commode, mais l’expression même trop lourde de sous-entendus pour que ne s’éveille point notre méfiance. Le pittoresque vague d’une telle formule d’ailleurs ne pouvait que lui assurer un succès et la quasi universelle vanité se réjouit de ces mots où sa prétention a trouvé de quoi être doucement flattée, de quoi prendre sa revanche des épreuves que nul n’ignore dans notre lopin de temps et d’espace. Mais s’il fallait les malheureux accidents énumérés par Paul Valéry pour qu’une civilisation, selon ses propres termes, apprît à savoir qu’elle était mortelle, une telle civilisation, qui n’a pas mis en doute la légitimité