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Page:Crevel - Mon corps et moi (3e édition), 1926.djvu/103

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J’ai honte. Ce qu’il me faut constater n’est pas à mon honneur. J’ai eu peur de la solitude, et voilà pourquoi je suis dans cette loge. À confesser le vrai, cette femme m’ennuie et, certes, je ne saurais à moi-même, à mes pensées préférer une petite théâtreuse qui parle sans rire de son art et, toujours sans rire, ne manque jamais l’occasion d’affirmer : « Si j’avais su, au lieu de me donner à la chorégraphie je me serais livrée à la science. » Pour moi je ne saurais envier la chorégraphie ni plaindre la science. Au reste, cette femme ne vaut ni plus ni moins que la plupart des autres. Pourquoi attendre encore la créature à peine tangente à notre globe et venue d’un monde lointain, supérieur au nôtre ? Et dire que cette passante pourrait me donner ma photographie : un fils. J’ai peur. Deux sous dans la fente. Et dans neuf mois, mon portrait en résumé. Mais cette