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Page:Crevel - Mon corps et moi (3e édition), 1926.djvu/117

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Ce bruit mat, faut-il en accuser un soulier sur le plancher ou un gant qui fait plus ample connaissance avec une peau ? Si le petit est abîmé, il sera mon ami. J’aurai pitié, je serai bon. J’ouvre les yeux. Le Noir l’a poussé tout contre les cordes. Il halète, je vois dans tous ses détails le jeu des côtes. Hélas ! il profite de ce qui lui reste de souffle et de forces pour essayer encore des grâces. Alors je tourne le dos au spectacle. Un abat-jour de zinc doré me vaut plusieurs instants de contemplation mais, vite, je me retourne du côté de la scène car j’ai entendu des murmures où la plainte conventionnelle s’habillait d’espoir plutôt que d’anxiété :

« Ce sale nègre va le tuer.

— Il saigne comme un bœuf, ce pauvre gosse.

— Il a déjà une oreille comme un chou-fleur. »

C’est vrai, tout le bas du visage est couleur de bouche et une oreille est à moitié décollée...