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Page:Crevel - Mon corps et moi (3e édition), 1926.djvu/174

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je me répéterais que mes dents à heurter les autres dents, les dents étrangères, finissent par croire, au moins quelques instants, à l’intimité réciproque des squelettes.

Et puis, devant un miroir, mes yeux ne sauraient apprendre à connaître ce corps auquel ils appartiennent, cette âme dont ils sont les hublots.

Car seul, même au cas où ma propre image suffirait à me donner quelqu’un de ces désirs en quoi il faut chercher les plus probables révélations, des gestes identiques se faisant réponse, aucune surprise ne serait possible.

Au contraire, si mon attention se voue à quelque autre, à force d’oubli je me retrouve soudain plus riche. Spontanément fusent des brutalités, des précisions. Alors, comme si les yeux projetaient au travers de mon être des rayons X, j’ai l’impression de voir toute mon âme, et sans mensonge enfin, sans le mensonge du muscle que le fort subit seul à seul, sans le mensonge du fard que le faible