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Page:Crevel - Mon corps et moi (3e édition), 1926.djvu/197

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coque d’un navire maître du temps et de l’espace, étaient les antennes d’un lieu idéal et qu’on ne pouvait nommer que Paradis.

Le Paradis, le Paradis retrouvé.

Esprit, mon beau mystère, pourquoi mon corps, ce poids de chair, me force-t-il à retomber au fond de l’abîme, comme les semelles de plomb, le scaphandrier ?

Mon corps et moi ? Les corps et les autres ?

Mon corps, les corps ? Que puis-je en essayer qui ne me semble indigne de moi, des autres ?

Un corps qu’on me prête, j’en fais une machine.

Égoïsme, dira-t-on.

Mais si j’accepte d’être altruiste, c’est moi qui deviendrai machine. Les rôles seront intervertis, l’économie du couple n’aura pas changé. Sur deux unités, il y aura une chose et une créature. Donc deux solitudes.

Or si nous sommes deux à subir la même impression aucun n’est plus seul.