Page:Crevel - Mon corps et moi (3e édition), 1926.djvu/31

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avouée par pudeur, est pour mon triste secret à la fois réconfort et exaltation, car la volonté d’agir exercée contre un simple sexe, le côté pile ou face d’un individu, tout entier vêtu ou dévêtu, visible ou figuré, une masse, un peuple, ne m’a jamais paru naître que du besoin d’évasion.

Et certes si la science offrait un moyen de se tuer sinon agréablement, du moins proprement et sûrement, sans doute n’aurais-je point essayé de l’amour non plus que de ces départs dont le dernier me vaut cette méditation, ce soir sur la montagne.

Or aujourd’hui ce n’est plus de moi que je prétends m’échapper, mais des autres au travers desquels j’avais commencé par vouloir me perdre. Mes amis, mes ennemis, je leur dois la plus cruelle des hantises : leurs yeux, les miens, liquides aux densités différentes qui se superposent et jamais ne se peuvent pénétrer vraiment, se mélanger. Leurs yeux, j’ai accepté de les aimer, orgueilleux